Comprendre les influenceurs (pour moins les critiquer)

Comprendre les influenceurs (pour moins les critiquer)

  1. Promotion
  2. 2018/09/28

Influenceur. C’est un mot qu’on entend de plus en plus et qui fait lever les yeux au ciel de bien des beaux-pères sceptiques (le mien, surtout). Et c’est drôle parce qu’on m’a demandé de rédiger mon premier article de blogue sur les influenceurs quelques jours après que j’aie dû les défendre devant ce dernier. Voici donc un résumé de mon point de vue, en espérant qu’il puisse vous aider à comprendre le phénomène et vous permettre de l’expliquer dans vos soupers de famille.

« C’est quoi ça, un influenceur? »

Meilleure façon de commencer un débat : s’assurer que l’adversaire comprend de quoi il est question.

Même si le mot n’est pas encore très bien défini, on peut dire qu’un influenceur est une personne qui utilise les réseaux sociaux pour publier du contenu qui sera aimé par des gens qui vont s’abonner à elle. L’influenceur crée et entretient une audience particulière, fidèle à son contenu, qui apprécie surtout sa personnalité et lui fait confiance. Bref, c’est presque comme avoir une gang d’amis. Quand on est le centre du groupe.

D’un point de vue strictement marketing, « un influenceur est un individu qui par son statut, sa position ou son exposition médiatique peut influencer les comportements de consommation dans un univers donné ». L’influenceur, c’est le cool kid qui a les plus belles choses à qui on veut ressembler en ayant ces mêmes choses.

Les personnalités publiques (comédiens, chanteurs, journalistes, etc.) ont longtemps joué le rôle d’influenceurs pour les gens qui les suivaient à la télé. Maintenant, quand on dit « influenceur », on pense plus à une personne ordinaire qui, parce qu’elle post, devient connue.

Il y a plusieurs types d’influenceurs, qu’on va classer par niveau de popularité.

  • Les nano-influenceurs (moins de 1 000 abonnés)
  • Les micro-influenceurs (1 000 à 10 000 abonnés)
  • Les macro-influenceurs (10 000 et plus)

Les échelons changent selon les régions, le domaine d’influence et le nombre d’influenceurs dans ce domaine. Par exemple, dans le milieu littéraire québécois, un influenceur ayant 800 abonnés est considéré comme un macro-influenceur. Aux États-Unis, dans le milieu du lifestyle, il vaut mieux ne pas y penser avant d’avoir 100 000 abonnés. Que voulez-vous, les Kardashian y règnent en maîtres.

influenceur

« Oui, mais concrètement, ils font quoi? »

Mais…ils influencent! Sans blague, les influenceurs DÉTESTENT qu’on les appellent des influenceurs (oups, je l’ai encore fait), parce qu’ils trouvent le terme vide de sens. (Avouons-le, il l’est.) Ils disent que leur influence sur leurs abonnés est une conséquence, pas une tâche ou un but, au même titre que celle d’un comédien ou d’un politicien qui est aimé et qu’on a envie d’imiter. (Ok, je vous mets au défi d’entre trouver un dans la seconde catégorie.)

Oui, mais concrètement, ils font QUOI? Deux choses :

  • Agrandir leur audience
  • Créer du contenu accrocheur

Pour se faire connaître, ils ont recours à différentes méthodes, dont les 20 trucs faciles et efficaces pour augmenter son nombre d’abonnés dont on vous a déjà parlé, comme suivre des personnes produisant du contenu similaire, faire des collaborations, user des bons hashtags, etc. En augmentant leur nombre de followers, ils apprennent à connaître leur public et produisent du contenu (billets de blogue, photos, vidéos) qui va lui plaire.

Conclusion partielle : on serait mieux de dire qu’ils sont des créateurs de contenu numérique. Limite, des entrepreneurs. Ce serait plus juste que de les définir par l’effet qu’ils produisent.  

« Moi, je veux savoir comment les influenceurs deviennent riches. Qui est assez fou pour les payer? »

influenceur

Ouain, bin, la folie, c’est relatif. Et ça n’affecte certainement pas les stratèges marketing!

À moins de ne pas être influenceur à temps plein ou d’avoir eux-mêmes une compagnie, les influenceurs sont des travailleurs autonomes. Ils sont approchés par des entreprises pour prendre part leur stratégie de marketing d’influence.

Et on va se calmer sur la richesse. Oui, certains influenceurs ayant beaucoup d’abonnés reçoivent des petites fortunes pour une seule photo (on parle de montants dans les 5 ou 6 chiffres). Mais il y en a plein d’autres qui reçoivent le produit dont ils font la promotion et…c’est tout.

Mais ok, on va regarder pourquoi les entreprises investissent dans une seule personne plutôt que dans une campagne de publicité.

Plusieurs choses :

1. Les influenceurs ont un public très ciblé, parfaitement disposé à acheter le produit.

En mettant une annonce sur Facebook visible à tous ou un panneau sur la 40, on atteint plus de personnes, mais on atteint aussi beaucoup de personnes pas intéressées pantoute.

  2. Les influenceurs peuvent créer le contenu de la publicité à leur place!

Non seulement ils se sauvent une partie de la job (et encore là, c’est relatif), mais la promotion va être parfaite pour le public qu’elle veut atteindre : elle est créée par une personne qui parle à ce public Tous. Les. Jours. Et même, plusieurs fois par jour.

3. La recommandation d’un ami vaut 1 000 fois la recommandation d’une compagnie.

La relation de confiance entre influenceur et abonnés est super forte, parce qu’elle se fonde sur l’honnêteté. Et l’honnêteté, ça revient à la mode.

4. Ça permet de contourner Ad Block (pour les plus futés qui l’auraient installé).

Un blogueur que j’aime bien, Frédéric Gonzalo, stratège marketing, explique que le recours aux influenceurs marketing confond les bloqueurs publicitaires, parce qu’ils ont de la misère à savoir s’il agit de contenu promotionnel ou organique (créé pour le fun).

Conclusion partielle : pourquoi n’importe qui aurait le droit de recevoir un salaire pour son travail, sauf les influenceurs? Je viens de prouver que les entreprises avaient besoin de leurs services. On ne va quand même pas se servir d’eux SANS LES PAYER? (Petit rappel : l’esclavage a été aboli en 1865.)

« Bin là, n’importe qui est capable de poster une photo. C’est pas compliqué. »

Agrandir une audience, créer du contenu, répondre aux commentaires, c’est plus que poster une photo. Devenir une image de marque, c’est plus que poster une photo.

La personnalité des influenceurs et leur contenu deviennent une seule et même chose. C’est par son contenu que l’influenceur arrive à se faire aimer, à convaincre de sa pertinence et de sa valeur en tant qu’être humain, et non en tant que comédien, chanteur, etc. Et n’allez pas dire qu’ils n’ont pas de talent.

Conclusion partielle : c’est facile d’être compétent dans un domaine. C’est plus difficile de se faire aimer.

« En fait, ils sont tous vraiment self-centered. »

Ok, l’égocentrisme, maintenant. Argument prévisible. C’était ça, ou « génération d’enfants rois ».

Là, c’est moi qui ai levé les yeux au ciel.

On va se le dire : la tendance à s’intéresser juste à soi, c’est partout sur les réseaux sociaux. L’organisation des profils Facebook en timeline est faite pour que chacun ait un espace où raconter son histoire. En arrivant sur Facebook, la première chose qu’on nous demande, c’est « What’s on your mind [insérez ici votre prénom]? » Les réseaux sociaux encouragent à partager vos émotions, vos histoires, vos photos : votre profil est une histoire dont vous êtes le héros, vos amis et abonnés en sont les personnages secondaires.

Conclusion partielle : pourquoi les influenceurs seraient-ils plus égocentriques que nous? La seule différence entre eux et nous, c’est qu’on les voit plus.

« Les filles qui posent presque nues sur Instagram, là… »

…ont probablement des raisons de le faire qui t’échappent.

Il faut rester calme face au membre de la famille sceptique. Même si c’est difficile. Exprimer sa frustration, c’est détruire son argument.

Heureusement, les influenceuses sont venues à ma rescousse avec de brillantes pistes de réponse.

La photo Instagram de Marie-Lyne Joncas, ça vous dit quelque chose? Je vous la montre juste au cas :

influenceur

Eh oui, j’accorde mon attention (et la vôtre) à Marie-Lyne Joncas et elle ne tombe pas dans l’oubli par ma faute. Personne n’est parfait!

Donc, elle dit : « Ga moé, belle comme le jour. Pis j’ai pas le cul à l’air. C’est fou pareil de se dire qu’en 2018, c’est normal, de se mettre quasi nue sur Instagram. […] »

Et les féministes d’Instagram ont mis leur pied à terre. Elles n’ont insulté personne. Elles sont restées calmes. Mais elles ont fait comprendre que c’était inadmissible.

Elie Duquet, par exemple, a mis en ligne une vidéo. Elle y affirme que pour certaines femmes, c’est une émancipation, une réappropriation de l’image de son corps. Une façon d’avoir plus la confiance en elles. #girlpower

Selon elle, ce serait malsain juste si celles qui posent le font pour les likes. Si elles pensent que c’est la seule façon d’être aimée et d’avoir beaucoup d’abonnés.

Elisabeth Rioux, que l’on voit souvent en bikini, était déjà familière avec cette critique. Il en a été question en entrevue avec Martin Latulippe, un mois avant la photo de Marie-Lyne Joncas. Elle affirme qu’elle propose le type de contenu que les gens veulent voir. Une fois qu’elle a obtenu leur attention, elle en profite pour passer des messages positifs d’acceptation de soi et de diversité corporelle en description.

Toutes les deux soulignent qu’Instagram, ce n’est pas comme la télévision. À la télé, on ne choisit pas ce qu’on nous montre pendant les pauses de nos émissions préférées. Sur Instagram, on voit seulement ce qui nous plaît. Quand ça nous dérange, on peut appuyer sur Unfollow. C’est comme de ghoster quelqu’un. Sauf qu’il ne le saura pas.  

Conclusion partielle : ce serait le fun qu’il y ait un peu plus de respect sur les réseaux sociaux. Un peu plus de compréhension aussi. Et, avouons-le : les filles en maillot de bain sur Instagram, si on les regarde autant, c’est parce qu’elles sont belles.

influenceur

« Si Instagram plante demain matin, les influenceurs ne sont plus rien. »

Alors si mon beau-père perd son travail demain matin, il n’est plus grand-chose lui non plus, c’est exact? Mais non!

Instagram va disparaître, c’est sûr. Comme Skyblog. Comme MySpace. Comme bientôt, peut-être, Facebook. Tous les abonnés du monde n’auront plus aucun poids et ne seront plus une source de revenus.

Admettons qu’une compagnie ferme ses portes. Les travailleurs, laissés sans emploi, renouvellent leur CV, y ajoutent leurs nouvelles compétences et postulent ailleurs. Les influenceurs feront de même; ils se renouvelleront.

Conclusion finale : chers sceptiques, ne soyez pas si inquiets pour eux. On jurerait que vous commencez à les aimer.

Score : 1-0 pour moi (et vous, lecteurs). 😉

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